Tu ne t’es jamais trop intéressé.e au féminisme mais tu te rends compte des gros problèmes sociétaux ? Tu es un.e. ex-misogyne qui veut se reconvertir ? Tu veux juste approfondir tes connaissances ? Bienvenue dans la FAQ qui répond aux questions bienveillantes et constructives. J’ai rassemblé ici les questions qu’on m’a le plus posées :

- Pourquoi t’es-tu intéressée au féminisme ?
Pour moi, ça a commencé quand je tenais une émission de radio de musiques électroniques à Nantes (Technosaurus) et que j’ai voulu faire une émission sur la place des femmes dans la Techno. C’était évident pour moi qu’il y avait un problème duquel on devait parler mais je n’avais pas encore réellement réfléchi au sujet, je me rendais simplement compte qu’il était plus difficile d’être une DJ légitime en tant que femme et qu’elles étaient sous-représentées sur la scène. Le jour où j’ai demandé à Twitter si c’était une bonne idée de réfléchir sur ces sujets (parce que oui j’avais encore besoin de l’avis des gens pour savoir si c’était ok de réfléchir sur la place des femmes…) les réactions ont été si nombreuses, si violentes, si insensées que j’ai réalisé l’immensité du problème. Suite à ça j’ai commencé à lire, à écouter, à rencontrer et à parler. J’ai voulu comprendre les causes du problème, j’ai commencé à tout repenser, à tout remarquer et à ne plus rien laisser passer. J’ai essayé de comprendre les inégalités, les disqualifications, les conflits d’identité, le poids des stéréotypes… Je me suis rendue compte que le féminisme n’était pas un combat des femmes pour les femmes mais qu’il représentait bien plus que ça pour la plupart d’entre nous : C’est une remise en question de toutes les injonctions normatives de la société, c’est un espoir et une bataille quotidienne, du détail au plus explicite vers le changement des mœurs.
- Quelles sont les personnes qui t’ont inspirées ?
Marguerite Duras, Simone de Beauvoir, Léa Salamé (et oui), Mymy (de Madmoizelle), Paula Temple, Electric Indigo et ALISSA MILANO OUI. Et plein d’autres personnes de mon entourage qui se reconnaitront.
- Toi aussi tu faisais/disais des conneries sexistes avant ?
Oh la la que oui. Evidemment. Avant de se pencher sur le sujet, le principal ennemi de la femme dans un monde patriarcal c’est les autres femmes. Le combo mauvais côté de l’histoire + manque de confiance en soi est un régal pour la misogynie intériorisée. Les femmes se font la guerre entre elles parce que les places légitimées auprès du groupe dominant se font chères. Mieux vaut être du côté des hommes que de celui des femmes. Accepter le sexisme, le racisme ou toute forme de discrimination (inconsciemment certainement), c’est se désolidariser du groupe opprimé et ridiculisé pour s’approcher du groupe dominant. C’est facile. Mais tout le monde peut changer, encore heureux. On comprend que le problème n’est pas les autres femmes. On s’engage, on regrette que la sororité ne soit pas dans tous les coeurs.

- C’est quoi le genre ?
À la différence du sexe qui est un attribut biologique (male ou femelle), le genre est la construction sociale et identitaire d’un individu qui se définie comme étant les différences non biologiques entre les identités sexuées. Certains définissent le genre d’un individu comme étant le niveau de conformité de son identité sexuelle à une des deux normes sexuelles majoritaires. Ces définitions sont un peu trop binaires, mais celle-là me paraît pas mal :
« Ensemble des discours qui produisent la différence des sexes, et plus généralement la construction sociale de la différence sexuelle en tant qu’elle s’inscrit dans l’économie des rapports sociaux de sexe, rapports structurés par une domination du « masculin » sur le « féminité », évolutifs dans l’histoire et dans l’espace social » dans Le genre, une notion féconde pour les sciences sociales de Frédérique Omer-Housseaux (Idées économiques et sociales n°152, 2008).
« On ne naît pas femme, on le devient » SdB.
- C’est quoi les stéréotypes de genre ?
Les stéréotypes (en psychologie sociale) sont les croyances et représentations simplifiées d’une catégorie sociale. Ils sont souvent caricaturaux et unificateurs. Les stéréotypes de genre sont des représentations simplifiées et caricaturales des identités genrées. Le garçon est fort, aime le bleu et est bon en math. La fille est délicate, aime le rose et est bonne en français.
Les genres masculins et féminins désignent les attributs symboliques, les représentations qui sont attachés par une société à une configuration anatomique (Ann Oakley, Sex Gender and Society 1972)
« Si les stéréotypes sont dans un premier temps, importants pour l’enfant, car ils lui donnent une appréhension simplifiée du monde qui l’entoure, il faut dans un deuxième temps pouvoir sortir de ce schéma restrictif qui découpe le réel en catégories pour parvenir à une représentation plus complexe et moins clivée du qui nous entoure »
(Dans Des stéréotypes de genre omniprésents dans l’éducation des enfants par Evelyne Daréoux, revue Empan N°65, 2007)
- C’est quoi les mythes ?
« Récit mettant en scène des êtres surnaturels, des actions imaginaires ou des fantasmes collectifs » dans Larousse.
Pas mal d’articles sortiront là dessus, mais en gros les mythes sont fondés par les individus en réponse à un mystère de la nature (« Pourquoi la femme est-elle plus faible physiquement que l’homme ? Parce que Eve a été créée à partir de la hanche d’Adam bien sûr ! ») et sont ce sur quoi se sont basés les stéréotypes de genre, de classe, d’ethnies etc présent dans les consciences collectives.
- C’est quoi le mansprenaingterrupt machin ?
Mansplaining : Quand un homme se sent obligé d’expliquer des choses à une femme parce qu’il la croit -inconsciemment- pas apte pour comprendre.
Manspreading : Quand un homme s’étale dans le métro et écarte inconsciemment les cuisses sans se demander s’il prend pas 3 places pour lui.
Manterruption : Quand un homme coupe sans cesse la parole à une zooz.
Autre chose ?
Ces termes désignent des petites humiliations vécues des dizaines de fois chaque jour par les femmes. En ce sens, ils sont importants car ils font partie d’une mouvance qui va vers l’analyse détaillée du réel et la dénonciation d’un état d’esprit inconsciemment sexiste.
- Et du coup ça sert à quoi d’être féministe ?
Une fois qu’on s’est rendu compte de toutes ces inégalités, de toutes ces injonctions qui limitent les libertés individuelles des femmes et de toutes les identités genrées, il est impossible de ne pas vouloir rentrer dans le débat. C’est pas tous les jours de la tarte (dsl) mais au final le monde est tellement plus cool quand on a dégagé les raisons des disqualifications sexistes. C’est tellement plus cool quand tu comprends que ton animosité envers les autres femmes est infondée et que tu décides de penser les femmes par le biais de la sororité. C’est tellement plus cool de rentrer dans une démarche de rejet des injonctions à la beauté. Le regard sur soi et sur les autres s’en voit modifié et c’est un régal #cuicui.
- Les problèmes des féministes en France sont-ils insignifiants ?
Chaque inégalité vaut son combat. Etre féministe n’exclue pas le fait d’être investie dans d’autres causes (au contraire justement, l’engagement entraine l’engagement). Tant qu’il y aura de la souffrance et de la violence basée sur des disqualifications sexistes, on sera là pour continuer d’en parler.
Tous les détails humiliant ou les différenciations quotidiennes, aussi petites quelles puissent paraître, font parti d’un grand système dégradant envers la femme et toutes les personnes qui ne correspondent pas aux stéréotypes de genre.
- Est-ce que quand on est féministe on déteste les hommes ?
OUI ON LES DÉTESTE TOUS BROUAAABLBLBLBLBL.
Non, bien sur que non. Ce sont des idées, des injonctions et des violences que nous combattons, pas la totalité de la population hétérogène représentée par l’être humain « homme » lolz. Je préfère quand même préciser.

- Tout le monde peut être féministe ?
On devrait tous être féministe. Comme on devrait tous être anti-raciste, anti-sexiste, anti-spéciste (bon là c’est autre chose ok). « Feminism is the radical notion that women are human beings » (Marie Shear), le féminisme c’est un humanisme, tout le monde peut être humaniste.
- Mais du coup, tu t’investis dans aucun autre combat ?
Si. On a pas forcément besoin d’être touché par une inégalité pour y être sensible.
- Pourquoi il y a-t-il souvent plus d’hommes dans les postes haut-placés ou les domaines techniques ?
Cette question, mal posée, peut se retrouver dans la FAQ malveillante, mais on se la pose tous à un moment.
Il y a plusieurs causes à cette inégalité mais AUCUNE d’entre elles n’est une cause biologique. Un dossier plus détaillé sur la question sera bientôt posté mais en gros :
- Stéréotypes de genre induisent ambitions personnelles à la baisse pour les femmes
- Manque d’information pour les filières techniques, numériques, spatiales, robotiques etc pour les femmes
- Manque de confiance en soi + pas le droit à l’erreur pour une femme dans un métier intellectuel ou technique = découragement
- Auto-censure pour atteindre des postes haut placés
- Discriminations classiques : Salaires à la baisse, ressenti d’illégitimité, syndrome de l’imposteur.
